C’est l’odeur de la mort qui s’infiltre à nouveau dans un recoin de ma tête, ça commence comme ça. Une simple chute, et c’est le début de la fin d’une vie. J’aurais les allers venues de cette vie dans un tremblement de cœur. Les séparations, les manipulations sous couvert d’innocence, les rires, les retrouvailles, et de nouveau la distance. Que restera t-il du fossé qui siégeait entre nous ? Va t-il mourir, ou son attente se poursuivra t elle dans ces abattoirs pour vieux ? Se demandera t-il s’il aurait pu agir autrement pour préserver les liens ? Et pendant ces cinq jours allongé sur le carrelage, aussi seul que la mort, a t-il pleuré sa solitude, maudissant tous ces êtres qui ne le visitent pas assez pour s’apercevoir que sa vie s’enfuyait lentement sur ce sol froid et sale ? Qui de la soif ou de l’amertume lui a le plus barré la gorge ? A quoi ressemblent les pensées d’un homme qui a tout perdu, à qui tout le monde a tourné le dos ? Quelle est ma place au milieu de ses tourments ? La vie va et vient, j’en ai créée une et en ai perdu une. Peut-être bientôt deux ? Mon esprit tourne en rond dans une peur sourde, accaparé par la souffrance qu’il a dû endurer. Et si ces jours longiformes l’ont mis face à la réalité de son isolement, ce n’est que la triste continuité de ces vingt dernières années. Sa vie, c’était déjà ça. Pas besoin d’une chute qui s’éternise pour le deviner, n’est ce pas ? L’espoir de visites qui ne viennent pas, l’attente de pardons qui ne sont pas permis par l’ego. Les minutes, les journées, les années qui se suivent et se ressemblent, bercées par le fond sonore de la télévision et la fumée âcre de cigarette. Essayer de comprendre l’effet que ça peut produire de traverser à reculons une vie qui n’a plus aucun sens. Sans bataille et si peu d’amour. Renié par ses propres fils, sa femme, ses frères. L’ignorance et l’empathie me scrutent de leurs yeux mi-figue mi-raisin, attendant que je redonne forme aux tempêtes qui m’assomment. Et ses tempêtes à lui, vont elles éclater ? S’il perdait son papa, à quoi ressembleraient ses yeux scrutateurs ? Les larmes pointeraient elles ? Me laisserait il le serrer dans mes bras, malgré les distances qui me tiennent loin de lui depuis cette fichue épidémie ? Laisserait il rugir sa peine, lui qui ne laisse jamais entrevoir ce qui se cache à l’intérieur ?
Va t-on encore assister à la vie qui se fait la malle ?

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